Article de Brigitte Einhorn
APLD 91, fondée en 1992 et présidée par Jean-Paul Réti, a son siège dans les anciens entrepôts frigorifiques entre la BnF et les Grands Moulins. Depuis 1980 la SNCF a commencé à louer les locaux en l’état, c’est-à-dire des chambres frigorifiques sans aucun équipement. Ce sont les locataires qui ont un à un transformé ces espaces aveugles en ateliers polyvalents en perçant des fenêtres et aménageant les espaces en fonction des moyens des uns et des autres. Ils se sont joints aux habitants et usagers du quartier pour la sauvegarde de ce bâtiment industriel emblématique mais aussi pour s’opposer au projet de quartier d’affaire imaginé par les élus du moment. L’action, soutenue par plus de 5 900 signataires, a payé (maintien dans les lieux, déplacement d’une rue, mais aussi en actions conjointes coupure en deux du MK2 par un passage piéton pour faciliter la circulation). Le plus spectaculaire est d’avoir obtenu la construction de 30 ateliers polyvalents pour remplacer ceux qui avaient été détruits en 1998 en vis-à-vis des leurs ateliers où se trouvent actuellement les bâtiments de « Séquana ».
La qualité de la construction des « Frigos » a permis la cohabitation de 17 professions allant de la petite industrie à l’édition, aux métiers d’art, artistiques et artisanaux. Cette arborescence et cette diversité ont été accompagnées par des créations d’emplois. L’association veut préserver cette mixité économique et sociale menacé par certaines décisions récentes du propriétaire actuel, la Ville de Paris.
C’est cette diversité que l’association voudrait voir reproduite dans de nouveaux lieux à construire, en particulier rue Masséna-Bruneseau.
Pour l’instant le projet sur ce secteur n’assure nullement en nombre suffisant des locaux pour les professions énumérées et si utiles pour rééquilibrer le quartier Paris Rive Gauche.
Depuis 1997, APLD 91 participe à la concertation mise en place à PRG et agi sur le processus d’aménagement. et Le fait de bien connaître le terrain et de s’être fortement investi dans l’action, donne une compétence , une « expertise » d’usage, qui s’est enrichie par l’implication dans tous les groupes de travail. Il y a un apport mutuel et enrichissant entre les acteurs locaux et les professionnels de l’aménagement. Néanmoins il leur est très difficile de faire appliquer sur PRG l’objectif qu’ils souhaitent atteindre, celui de la « mixité verticale », le mélange des genres autour d’activités de petite taille (PME, micro entreprises), consacrées à la production ou à la transformation des matériaux. APLD 91 exige pour l’instant sans retour de la part des élus, le rattachement des « Frigos » aux m² recensés comme étant des surfaces dédiées à la production, à la transformation des matériaux. Il ne suffit pas d’encaisser leurs loyers pour leur offrir reconnaissance et légitimité. Actuellement, avec le projet Masséna-Bruneseau, l’enjeu est important car, en fin du programme, ce sont les derniers terrains à aménager. L’utilisation à donner aux 100 000 m² prévus pour les activités est décisive. C’est la dernière chance dans la voie de la mixité mais c’est justement le moment où la concertation marque le pas. De façon générale, il y a blocage, avec des décisions prises dans le dos des associations. Le samedi de la concertation en préparation pour le 12 juin illustre ce recul : il faudrait expliciter ce que veut dire création de 100 000 m² d’activités. Pour l’instant l’aménageur refuse de donner la proportion des surfaces qui reviendraient aux activités de production. APLD 91 affirme que si l’identité des « Frigos » comme acteur de PRG n’est pas reconnue au sein de la ZAC, elle ne pourra pas avoir une vraie légitimité « d’experts d’usage » pour discuter de l’affectation des terrains. C’est pour cette raison que l’association a refusé de participer aux « tables rondes » du Samedi de la Concertation. Toutefois elle y assistera dans le public pour interpeller ses partenaires. Le processus de la concertation est remis en cause par de nombreux manquements, dont celui-ci. Et encore plus grave ; la crise financière n’est pas évoqué en Concertation, pourtant elle risque d’imposer des infléchissement aux programmes immobiliers prévus.
L’association, à vocation généraliste, se veut ouverte sur l’extérieur. Majoritaire sur le site des Frigos, elle coopère aussi avec les conseils de quartier, en particulier c’était le cas avec le C.Q N° 7. Ici aussi, cependant, une déception : JP Réti au nom d’APLD 91 avait fait adopter un vœu que le Conseil de quartier a dûment voté pour que les habitants participent au choix des artistes appelés à décorer de leurs œuvres le parcours du tramway qui va être prolongé. Or, au mépris de ce vœu, le ministère de la culture a passé outre en confiant le choix des artistes à un « spécialiste » et cela, sans aucune information vers la population et leurs Conseils et associations. Est-ce vraiment de la démocratie participative ?
Brigitte Einhorn